PATRONAT & SALARIAT
S'il reste encore, parmi nos amis, quelques-uns qui croient à
la possibilité d'une entente amiable entre le Patronat et le Salariat,
et qui escomptent sur le groupement syndical pour concilier le litige dont
nous souffrons tous, nous croyons de notre devoir de leur dessiller les
yeux.
L'homme est avant tout un être profondément égoïste,
ayant pour but son bonheur propre, particulier, et qui ne peut admettre
qu'en seconde ligne le bonheur des autres, le milieu social dans lequel
l'homme évolue de nos jours le poussant à être d'autant
féroce.
L'altruisme qui le fait agir en certains cas n'est qu'une transformation
de cet égoïsme, amené par le coudoiement social, et
qui permet que tel sentiment exprimé, à première vue
désintéressé, n'est que l'expression d'un sentiment
égoïste, plus tangible que visible.
Ceci admis, comment vouloir concilier l'intérêt patronal
avec l'intérêt ouvrier ? Ces intérêts antinomiques.
chaque fois qu'un exploiteur semblera concéder aux exigences
d'un exploité, il ne pourra y avoir, au fond, qu'une exigence forcée
au sacrifice de son intérêt propre, particulier, où
un intérêt caché le poussait à ce semblant de
sacrifice. Et la nature humaine le poussera obligatoirement à reposséder,
sous une forme, la dépossession volontaire ou obligée à
laquelle il semble acquiescer, ce qui revient à dire plus simplement
que «ce qu'on donne d'une main on le reprend des deux».
si tout le monde voulait accepter ce raisonnement, aussi simple qu'expérimentalement
établi, on aurait vite fait de reconnaître qu'une société
basée sur l'antagonisme des classes, et par conséquent des
intérêts, ne peut être que préjudiciable à
la classe dirigée, la classe dirigeante possédant pour elle
tout ce qui constitue la force actuelle : lois, pouvoirs, et leurs représentations
: magistrature, armée, police, etc.
Et partant de ce raisonnement, personne ne songerait plus à
émousser les forces prolétariennes dans une lutte inégale
contre le fait acquis et légalement établi. Bien plutôt
on penserait à développer intellectuellement les individus,
à leur démontrer les tares sociales, à combattre les
préjugés qui leur servent d'assise, et, en les démolissant,
à donner pleine et entière liberté à l'individualité,
dans ce qu'elle a de complet et de virile.
Malheureusement, il n'en est pas ainsi :
Le prolétaire, abruti par une vie de labeur incessante, énervante,
absorbante, ne peut faire agir ses lobes cérébraux qu'un
temps déterminé. Il donne toute sa capacité cérébrale
au temps exigé par les nécessités du travail pour
vivre et sort de là vanné physiquement, ce qui atrophie la
capacité intellectuelle, et incapable d'autre chose que ramasser
les lieux communs ordinaires ou de parler «métier».
Les quelques-uns, qu'un tempérament plus révolutionnaire
ou une situation moins absorbante ont fait songer à leur position,
triste d'avenir comme de présent, pétris qu'ils sont de vieilles
antiennes et de la routine, ronronnent et tempêtent en énergumènes
contre le petit côté de la question, accusant tel ou tel homme,
tel ou tel système d'être la cause de tout le mal. Au lieu
d'attaquer la question au fond, de la traiter philosophiquement et impartialement,
ils se laissent entraîner à chatouiller leurs petites préférences,
à tonner contre leurs antipathies.
S'ils voulaient délaisser et rejeter loin d'eux la méthode
subjective qui les fait agir ainsi, ils verraient vite que tous ceux de
leur classe, qu'ils accusent de leurs maux, sont bien plus à plaindre
qu'à blâmer et que, comme eux, ils sont les victimes de l'antagonisme
existant entre Patronat et Salariat.
Puisqu'on est obligé d'admettre l'intérêt particulier
primant chacun des actes humains, on doit admettre que la situation économique
poussant de plus en plus les intéressés à sacrifier
les autres à leur profit, le fossé qui sépare le travailleur
de l'exploiteur, bien loin de se combler ne peut que s'élargir.
Poussé par la concurrence, l'homme exploiteur ne veut subir
aucune des malversations du marché. Il doit donc en faire retomber
les exigences sur ceux qu'il emploie, rognant de plus en plus leur part
pour sauvegarder autant que possible la sienne propre.
Quand on parle donc d'entente et de bons rapports entre exploiteurs
et exploités, on se demande qui l'on veut tromper ici.
Il n'y a pas d'accord possible entre le producteur et l'exploiteur,
leurs intérêts contraires les lancent fatalement dans une
guerre obligée.
Ceci est tellement évident, tellement exact et les patrons bonnetiers
de Troyes Ñ pour ne parer que de ceux-là Ñ l'ont si bien compris
que pour mieux tenir sous leur férule leurs «bons» ouvriers,
ils ont établi parmi ceux-ci des catégories chargées
d'exploiter en seconde main leurs collègues : c'est ainsi que dans
une fabrique de bonneterie ayant quelque importance, un ouvrier en odeur
de sainteté a sous sa direction un, deux et jusqu'à trois
«commis» ou «cafards» qu'il fait suer au travail
et dont il palpe la moitié du salaire gagné. L'on peut dire
que c'est là le dernier mot de l'exploitation.
«L'ennemi, c'est le maître!» de quelque nom, de quelque
forme on l'affuble. Et pour le moment, travailleurs, l'ennemi c'est le
Patronat, dont les intérêts humains, fondamentalement opposés
aux vôtres, ne pourront jamais s'allier aux vôtres. Laissez
de côté les pauvres hères de votre classe, qui, moins
bien partagés que d'autres, en subissent encore plus durement le
joug émasculant ; déclarez nettement et carrément,
dans vos actions, dans vos paroles, dans vos idées, la guerre aux
tyrans.
Dépouillez-vous des préjugés qui vous entravent,
ne croyez plus aux hommes, même aux nouveaux, ne profitez pas de
votre force pour accabler la faiblesse, mais bien plutôt, prenant
conscience de votre valeur propre, cherchez à déterminer
chez les autres la conscience de leurs qualités ; devenez un individu,
faites des individus, ce sont eux qui forment les sociétés,
et les sociétés seront d'autant mieux constituées
que les individualités qui les composent seront plus conscientes
et plus développées.
|
LA DYNAMITE À BARCELONE
A Barcelone, des faits graves viennent
de se produire, une quantité de personnes appartenant à la
classe bourgeoise, viennent d'être atteintes par des explosions de
bombes, conséquence fatale des excès de la bourgeoisie espagnole.
Et quoi ! les dignes représentants
de cette classe égoïste et féroce, se figurent que les
tortures infligées aux Anarchistes exécutés à
Xérès, que les camarades qui meurent dans les prisons espagnoles,
attendant le bon plaisir des magistrats, que la misère qui va toujours
grandissante, occasionnée par la rapacité d'une quantité
d'individus, resteront sans effet.
Tous ces actes inouïs amènent
forcément des représailles.
Depuis longtemps, nous avons averti
les bourgeois de ce qui arrive.
Le juge d'instruction Tondut peut
dire qu'en février 1887, un camarade d'ici lui a dit : Si la
bourgeoisie continue ses excès de férocité sur les
Anarchistes, un jour viendra où les pavés des rues danseront
et les maisons sauteront.
Un journal qui s'intitule républicain,
dont le nom est Le Petit Parisien,a la stupidité de proposer
la relégation de tous les Anarchistes connus. Il faut croire que
la peur talonne rudement les pauvres idiots qui y écrivent.
Croyez-vous, Messieurs les bourgeois,
et prenez-en votre parti ! rien n'arrêtera l'idée anarchiste
de s'accentuer de jour en jour. Ce n'est ni l'état de siège,
ni les arrestations en masses, ni la suppression de la liberté d'écrire,
qui empêchera de continuer notre propagande, car les hommes
qui arrivent au point de sacrifier leur vie pour celle de l'humanité,
savent que la disparition de la classe bourgeoise amènera forcément
le règne de la justice et de la liberté, le bonheur de tous
les êtres humains.
LE PARIA
.... Le voyez-vous, ce misérable,
ce loqueteux, ce vagabond, ce mendiant, ce traîne-misère,
ce traîne-fange, ce squelette humain, ce crève-la-faim, ce
va-nu-pieds, ce paria, ce hors-la-loi, le monde et la société
?
Où va-t-il ? Qui est-il
? D'où vient-il ? Et que veut-il ?
Où il va ? Le sait-il seulement.....
Il va là où il sait trouver un remède à ses
maux, à calmer sa faim et sa soif, jamais assouvies..... Il va là
où il pourra se reposer !..... Qui est-il ? sinon, un paria !.....
Un être à qui l'homme généreux Ñ le bourgeois
! Ñ donne l'aumône !..... Il a été, peut-être,
riche, aisé, où il avait de l'à-peu-près, sinon
le nécessaire !.....
..... Maintenant, honteux de lui-même,
et que la marâtre société Ñ dans laquelle nous vivons
Ñ l'a rejeté hors de son sein, incapable Ñ par les mille circonstances
de la vie et la force des choses Ñ de sortir de l'ornière où
il s'est enlisé!.....
Il végète, si ce
n'est vivre... D'où vient-il ? Malin, serait celui qui pourrait
le dire ! Il sort, peut-être bien, de la classe dite «supérieure»
Ñ à cause de son infériorité ! Ñ où plus probablement
encore, de la classe des éternels parias, les ouvriers !.....
Que veut-il ? Du bien-être,
sans doute, le Droit à la vie ; manger à sa faim, boire à
sa soif, et le reste...............................................................
......................................................................
Le paria, avachi et indifférent
d'hier, a fait place au révolté d'aujourd'hui !..... Las
de souffrir et de geindre, assoiffé de justice, il veut, cet homme
Ñ cette humanité vivante!..... Ñ sa place au soleil !!!!...... L'Avenir,
désormais, est aux Parias !
PENSÉE
La Religion Ñ pour les Inconscients Ñ c'est le bonheur
dans le ciel ! L'Anarchisme Ñ pour les conscients Ñ c'est le bonheur Ñ
celui-là plus réel et naturel Ñ sur la terre !
MÉLANGES ET DOCUMENTS
Le maître d'école : dis-moi donc d'où
la fortune de ton père est venue.
L'enfant : du grand-père.
Le maître d'école : Et à celui-ci
?
L'enfant : Du bisaïeul.
Le maître d'école : Et à ce
dernier.
L'enfant : Il l'a prise !
GÏthe
|