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Adhémar SCHWITZGUÉBEL
MANIFESTE
Adressé aux ouvriers
du Vallon de Saint-Imier
Ce manifestedont la rédaction fut confiée à ADHÉMAR SCHWITZGUÉBEL a été imprimé à Neuchâtel, imprimerie G. Guillaume fils, en février 1870, et vendu pour le prix de 10 centimes. son origine est expliquée par une correspondance daté du Val de Saint-Imier, 2 novembre 1869, et adressé à L'ÉGALITÉ, journal de l'Association internationale des travailleurs de la Suisse romande, paraissant à Genève: Il se manifeste depuis quelque temps un mouvement très réjouissant dans le sein de la classe ouvrière de notre Vallon. On commence de toutes parts à s'occuper sérieusement des questions sociales, de la nécessité d'une organisation ouvrière, du rôle présent et à venir de l'Internationale ; il y a de violentes attaques, de chaleureuses défenses, en un mot il y a de la vie. Un groupe d'ouvriers de Saint-Imier a convoqué pour le 31 octobre une assemblée populaire qui a eu lieu à Saint-Imier, et dont le but principal était l'organisation ouvrière. On a fait ressortir la nécessité de fonder dans chaque métier une société de résistance et de compléter la Fédération ouvrière du Vallon au moyen de l'adhésion de toutes les sociétés de métier. Une commission a été chargée de la rédaction d'un Manifeste à adresser aux ouvriers ; ensuite elle provoquera, dans les parties où il n'y en a point, la fondation d'une société de métier.
(6 novembre 1869).
  Le texte en a été repris dans un ouvrage élaboré par James Guillaume en hommage à son ami : QUELQUES ÉCRITS, ADHÉMAR SCHWITZGUÉBEL - Stock, Paris, 1908.


Citoyens,
 

L'un des faits les plus réjouissants et les plus significatifs de notre époque, c'est la participation toujours plus active des classes ouvrières à tout ce qui se rattache au bien-être moral et matériel des peuples.

Les grèves, qui se multiplient chaque jour davantage et qui ont fait, dans le Jura, leur apparition d'une manière éclatante, contraignent pour ainsi dire les populations à s'occuper de cette question tant redoutée qu'on appelle la Question sociale.Chacun se préoccupe de trouver un remède ou un palliatif : quelques-uns n'aboutissent qu'à proposer des remèdes empiriques, mais tous semblent prévoir qu'il faut une solution nouvelle aux problèmes économiques posés universellement par les ouvriers.

Pour favoriser ce courant d'idées et provoquer une discussion publique sur la situation actuelle, quelques ouvriers prirent l'initiative d'une assemblée qui eut lieu le 31 octobre 1869 à Saint-Imier, et où, après une discussion approfondie, on nomma une commission chargée de la rédaction d'un Manifeste à adresser aux ouvriers, pour exposer aussi brièvement que possible la position faite aux ouvriers et les moyens aboutissant le mieux à une organisation générale qui puisse sauvegarder leurs intérêts communs.

C'est le travail dont nous avons été chargés que nous publions aujourd'hui.


Pour déterminer nettement la position faite à la classe ouvrière, il faut nécessairement que nous étudiions d'abord les rapports existants entre le travail et le capital, et ensuite les conditions où est l'industrie dominante dans nos contrées : l'horlogerie.

Si nous devions ici faire un cours de ce que l'on pourrait appeler "l'histoire de l'économie politique et sociale", nous pourrions établir d'une manière positive comment l'homme, après avoir été poussé par le besoin, a transformé la matière en instruments de travail et s'est ainsi créé un capital; comment, par le fait de l'appropriation individuelle du sol et des matières premières, une partie des hommes, plus intelligents, plus rusés, plus forts que les autres, arrivèrent par l'astuce ou la violence à asservir leurs semblables afin de les faire travailler à leur profit ; d'où il résulta que le capital social, composé du sol, des forces économiques naturelles et du travail accumulé des esclaves, devint la propriété exclusive d'une minorité qui, n'ayant rien produit, n'y avait aucun droit.

Une fois la société divisée en deux classes, l'exploitation de l'homme par l'homme devint une loi sociale, et toutes les institutions que l'on établit en vue de protéger l'ordre social aboutirent à consolider un état de choses qui, faux par sa base, n'était que le résultat d'une grande iniquité. Les révolutions que nous voyons apparaître à travers l'histoire de l'humanité, comme autant de protestations du droit naturel contre le fait du despotisme, n'ont guère changé que les mots : l'esclave est devenu serf ; le serf, salarié ; c'est que, dans un édifice reposant sur des fondements mauvais, il ne suffit pas de réparer le sommet pour tout améliorer, il faut s'attaquer à la base elle-même. A partir des premières années de ce siècle, le socialisme commence à rechercher et à dévoiler la cause de tous les abus ; peu à peu, les masses populaires s'emparent de la pensée nouvelle, et aujourd'hui le monde ouvrier s'affirme en face du monde privilégié : le Travail veut briser toutes ses chaînes.

Le Travail est-il réellement aujourd'hui l'esclave du capital, ou bien le salarié est-il libre vis-à-vis du capitaliste ? - La possession du capital étant de fait un privilège, et le travail humain, à moins de recommencer cette lutte longue et pénible qu'il livra et livre encore à la matière, ayant besoin, pour être fécondé, du capital, c'est-à-dire du travail d'hier, il s'ensuit logiquement que celui qui n'a que son travail est l'esclave de celui qui possède ; et toutes les constitutions politiques qui garantissent la liberté individuelle ne peuvent rien contre ce fait économique : celui qui n'a rien doit vendre son travail à celui qui peut le faire fructifier. Ce n'est que lorsque le capital, devenu propriété collective des travailleurs associés, ne sera plus un privilège pour personne, que la liberté sera un fait réel. On nous objectera que l'ouvrier, en livrant son travail, peut en marchander le prix, et, si les conditions qu'on lui offre ne lui conviennent pas, refuser ses services : erreur ! Le capital, étant le seigneur tout-puissant, fait partout la loi sur le marché général ; la nécessité oblige le travailleur à accepter les conditions qui lui sont offertes, autrement il a la liberté... de mourir de faim.

De la position qu'occupent le travail et le capital, il résulte que les détenteurs de capitaux, soit qu'ils les prêtent ou qu'ils les fassent fructifier eux-mêmes, réclament, pour les services que leurs capitaux rendent à la production générale, une rente quelconque leur permettant d'accumuler à leur profit les richesses dues aux efforts combinés du travail et du capital, et de vivre ainsi dans une oisiveté plus ou moins complète, ce qui est contraire à ce principe de justice économique : puisque chacun consomme, chacun doit aussi produire. ainsi les travailleurs, après avoir constitué ces capitaux, doivent encore en payer la rente, de sorte qu'ils n'ont qu'une partie des fruits de leur travail, qu'on appelle salaire, et que le reste va, sous les noms de bénéfices, dividendes, intérêts, etc., grossir la poche de ceux qui font travailler.

Qui est-ce qui détermine la part revenant au travail, à l'ouvrier, au salarié, et celle revenant au capitaliste, à l'entrepreneur, au fabricant, au patron ? - Les économistes répondent : C'est la loi de l'offre et de la demande, contre laquelle il est inutile de se révolter puisqu'elle est une loi naturelle. Nous acceptons cette réponse, mais avec la réserve suivante : comme ce sont les capitalistes qui ont entre les mains toute la puissance sociale, ce sont eux qui règlent l'offre et la demande, de sorte que les travailleurs doivent nécessairement subir la loi du plus fort ; c'est donc en définitive le capital qui fixe le prix du travail, qui détermine les salaires.

Telle est la position générale qui est faite aux classes ouvrières : en disant que le travail est l'esclave du capital, nous sommes dans le vrai.



Examinons un instant la position particulière de l'industrie horlogère ; si nous nous y arrêtons spécialement, quoique ce Manifeste s'adresse aux ouvriers de tous les métiers, c'est que du degré de prospérité ou de décadence de l'horlogerie dépend en grande partie le bien-être ou le malaise des populations de nos districts. Nous ne pouvons entreprendre, dans ce travail, l'histoire de l'industrie horlogère dans nos montagnes ; mais un simple raisonnement nous démontre que plus elle occupait de bras, plus elle rendait nécessaire l'introduction de nouvelles industries, augmentait le cercle de l'activité industrielle et commerciale, et devenait ainsi une source de prospérité générale.

L'horlogerie a eu, pendant un temps, une période comme peut-être jamais aucune industrie n'en aura jamais. Ses produits, recherchés partout comme objets de luxe ou d'utilité, n'alimentaient pas encore la spéculation mercantile ; les relations entre le capital et le travail n'avaient pas ce cachet d'antagonisme qu'elles ont, en général, dans l'état social actuel ; ayant besoin d'un de l'autre, le capital et le travail traitaient d'égal à égal, et la condition moyenne des fabricants n'était guère plus à envier que celle des ouvriers ; les mÏurs étaient l'image des conditions économiques, tout le monde était ami. Mais il devait arriver à l'horlogerie ce qui est arrivé ou arrivera à toute industrie occupant peu de bras et n'utilisant aucune machine. voici en effet ce qui se passe : si ses produits sont utiles et nécessaires, l'industrie impose les conditions qui lui conviennent sur le marché général, d'où découlent logiquement une rétribution élevée et des conditions de vie très faciles pour tous les employés à la dite industrie ; et ces conditions avantageuses sont précisément la cause qu'à un moment donné, alors qu'elles sont généralement connues, les bras viennent s'offrir en grand nombre dans l'industrie prospère.

Si nous vivions sous un système d'équilibre économique, c'est-à-dire qu'au moyen d'une organisation du travail on pût constamment établir une statistique sur les conditions des différentes industries, sur l'offre et la demande, l'état prospère d'une industrie n'entraînerait jamais aucun danger pour son avenir, puisque tous seraient au courant des besoins de la consommation, du nombre de bras déjà employés dans la production, et sauraient, par conséquent, s'il est réellement avantageux de porter son activité de ce côté ; mais dans l'état d'anarchie industrielle où nous sommes, chacun croit trouver son profit dans une surabondance de bras. Les fabricants calculent qu'en occupant un plus grand nombre d'employés, et en livrant à la circulation d'autant plus de produits, ils augmenteront le chiffre de leurs bénéfices ; c'est ce qui arrive pour quelque temps, en effet ; mais les produits dépassent bientôt les besoins de la consommation, qui impose alors aux fabricants les conditions qui lui plaisent. Les travailleurs, croyant arriver à une meilleure condition, s'étaient jetés en masse dans l'industrie qui offrait des salaires supérieurs, mais bientôt la concurrence les oblige à baisser les prix ; une partie d'entre eux s'en vont ensuite porter leur industrie dans des contrées où les conditions de la vie sont plus faciles, et achèvent ainsi de lui enlever les derniers restes de sa prospérité passée. Tombée à ce point, une industrie ne se soutient plus qu'en produisant en vue de la spéculation, et c'est en inondant le marché général de produits inférieurs qu'on cherche à ré-édifier les fortunes menacées ; dans ces conditions-là, il suffit d'une crise politique, de quelques mauvaises spéculations, pour plonger dans une misère complète des populations entières.

Cette double phase de progrès et de décadence, peu d'industries l'ont si profondément ressentie que l'horlogerie, et la longue crise que nous avons dû subir ces dernières années pourrait être aussi l'histoire de toutes les souffrances qu'entraînent après eux ces bouleversements industriels. L'histoire particulière de chaque famille, de chaque individu, est assez présente à la mémoire de tous pour qu'il devienne inutile d'insister sur les conséquences qui résultèrent, pour le pays, de la crise horlogère, que presque tous considèrent comme terminée. Le travail abonde, les prix tendent à se relever, les positions financières s'améliorent insensiblement, le courage moral paraît renaître dans les cÏurs ; l'on semble oublier le passé et se soucier peu de l'avenir.

Notre industrie est-elle réellement rentrée dans un état normal ? l'abondance du présent est-elle bien assurée ? sommes-nous certains de l'avenir ? - Tant que l'équilibre entre la production et la consommation n'est pas établi, une industrie n'est pas dans un état normal ; ce sont les spéculations financières et mercantiles qui nous procurent aujourd'hui une surabondance de travail ; demain le caprice d'un souverain peut arrêter court les transactions commerciales et paralyser l'industrie ; dès lors quelles garanties avons-nous pour notre existence ?

Nous oublions trop facilement le passé, revenons-y.

A l'époque où commença la crise, si de vastes associations ouvrières eussent existé, la position ne serait jamais devenue aussi critique, et une résistance sérieuse eût pu être opposée à l'introduction d'un trop grand nombre d'apprentis, à l'avilissement des salaires, aux différents modes de paiement qui ont exercé une funeste influence sur l'industrie. Mais les choses étant comme elles étaient, de quel droit, par exemple, faisons-nous un crime à un père de famille d'avoir préféré nourrir ses enfants avec les fruits d'un travail moins rémunéré, plutôt que de les laisser mourir de faim ? Il eût fallu pouvoir dire à chaque ouvrier : tiens, voilà pour nourrir ta famille, mais n'accepte pas des conditions désastreuses pour notre avenir commun.

Le passé de notre industrie est plein de précieux enseignements dont nous devons absolument profiter. L'histoire particulière de l'horlogerie, comme la position générale faite aux classes ouvrières par le capital, commandent impérieusement une prompte organisation.



Il y a longtemps que les ouvriers des pays les plus industrieux ont compris qu'une pareille position pouvait être modifiée, si les travailleurs s'unissaient et opposaient aux prétentions de patrons, des fabricants, des entrepreneurs, des capitalistes, des spéculateurs, la puissance de l'association. Ce qui, en définitive, fait la force des détenteurs de capitaux, c'est que le capital, représentant une chose, peut être consommé ou échangé contre des objets consommables ; qu'étant concentré en plus ou moins grande quantité dans une seule main, celui qui le possède a toujours une ressource et peut, au besoin, du moins pendant un certain temps, ne pas livrer ses capitaux au travail, tandis que celui-ci, représentant une personne, -l'ouvrier prolétaire, - doit toujours se livrer afin de sauvegarder son existence. Que les ouvriers se concertent entre eux, et les prétentions des privilégiés rencontrent déjà une opposition ; qu'ils constituent des caisses communes, et les patrons se trouvent en présence, non pas d'une puissance égale à la leur, mais d'une force déjà respectable cependant. Il a été constaté qu'un seul travailleur ne peut rien contre les forces centralisées du capital ; or, en s'unissant tous, il est évident que les travailleurs contrebalanceront les conséquences de l'isolement : ceci n'est pas seulement une affirmation théorique, mais des faits pratiques nous confirment dans cette manière de voir.

Dans toutes les industries, dans tous les pays, les patrons, grands ou petits, comprenant que les travailleurs isolés n'avaient aucune puissance de résistance, tendent à une baisse continuelle des salaires, soit qu'ils y soient poussés par les besoins d'une concurrence qui s'exerce au détriment du travail, soit que, désireux de s'enrichir toujours davantage, ils ne trouvent rien de mieux que d'assouvir leur cupidité en exploitant de plus en plus leurs salariés. L'accroissement du paupérisme a sa principale cause dans ce fait. L'extrême misère a fait germer dans la tête des prolétaires l'idée d'association, et c'est l'état misérable des populations ouvrières qui a donné naissance à une organisation créée dans le but de solidariser et de défendre les intérêts communs. Ne cherchons donc plus l'origine des associations ouvrières dans le cerveau exalté de quelque bienfaiteur de l'humanité, ni même dans la propagande socialiste, car on a vu de grandes associations prospérer et se développer avant que le socialisme ne fût annoncé aux masses, et si, aujourd'hui, les associations tendent à se généraliser, c'est que la nécessité oblige les ouvriers à profiter des enseignements socialistes.

Toutes les formes d'association sont-elles aptes à sauvegarder les intérêts du travail et à contrebalancer la puissance d'exploitation du capital ?

Nous n'avons pas à nous occuper, dans ce travail, des sociétés coopératives, qui nécessiteraient une étude spéciale très étendue, pour la raison bien simple que, dans les conditions économiques actuelles, elles ne peuvent exercer qu'une influence très restreinte sur la position sociale du prolétariat, et que nous devons rechercher un mode d'organisation embrassant les intérêts de tous les travailleurs salariés. Nous ne nous arrêterons pas davantage, d'une manière étendue, sur les sociétés de secours mutuels pour cas de maladie, parce qu'elle ne peuvent avoir aucune influence sur les relations entre le travail et le capital. Est-ce à dire que nous les condamnions ? Nullement, puisque d'abord elles sont un excellent moyen de constituer un capital social ; qu'elles établissent une certaine solidarité entre les membres qui les composent ; qu'elles peuvent être un palliatif très efficace pour remédier à certaines misères résultant d'une trop longue maladie. Mais c'est là tout leur mérite : Ïuvres essentiellement philanthropiques, elles ne peuvent produire que ce qu'a produit la philanthropie elle-même, éterniser la misère en se bornant à la soulager.

La forme d'association que nous devons étudier essentiellement, c'est la caisse de résistance.


La question des caisses de résistance préoccupe vivement ceux qui étudient la question sociale, et intéresse au plus haut degré la classe ouvrière, non seulement par l'influence qu'elles exercent sur la position actuelle des salariés, mais aussi par le rôle qu'elles sont appelées à remplir dans l'avenir.

Qu'est-ce qu'une caisse de résistance ?

C'est cette forme de l'association par laquelle les ouvriers créent un capital en vue du maintien des salaires, ou plutôt en vue de résister collectivement aux exigences du patronat et du capital, et d'opérer toutes les améliorations que réclame leur position de salariés.

D'où viennent les sociétés de résistance ?

Elles sont nées partout où la misère a poussé les ouvriers à rechercher les moyens de l'atténuer. A l'union pure et simple des cÏurs, les ouvriers ont ajouté l'union des intérêts, en cela plus pratiques et plus sages que maints philosophes qui veulent absolument tout réformer par le simple sentiment. La première forme de l'union des intérêts s'est manifesté par la société de secours mutuels ; mais si l'ouvrier était secouru en cas de maladie, son travail ne se trouvait protégé en aucune façon, et son salaire se réduisait peu à peu à des proportions tellement minimes, qu'il lui devenait impossible de vivre dans des conditions normales, tandis que les chefs industriels s'enrichissaient et devenaient de plus en plus exigeants. Alors, réduits à l'extrémité, les ouvriers, dans les pays où l'industrialisme s'est le mieux développé, où les relations entre le capital et le travail, entre le patronat et les ouvriers, se sont le mieux accentués, ont répondu, à la guerre économique que leur faisaient les patrons, par la défense énergique de leurs droits à l'existence.

La grève, ce fruit, non pas des caprices ouvriers, des intrigues des associations, mais d'un état de chose basé sur l'antagonisme des forces économiques, faisait son apparition et obligeait souvent le patronat à compter avec les ouvriers. Mais des luttes stériles apprirent bientôt aux ouvriers qu'il fallait, de même qu'une armée n'entre pas en campagne sans s'y préparer, s'organiser en vue des grèves ; cette nécessité d'organisation se fit surtout sentir alors qu'après avoir réussi à obtenir des patrons quelques améliorations, les ouvriers reperdaient bientôt les fruits de ces luttes pénibles, faute de pouvoir se défendre contre des empiétements nouveaux. C'est que, de même que le capital fait une guerre continuelle au travail, afin de lui extorquer tout ce qu'il peut, de même les capitalistes se font la guerre sur le marché général, parce que le capital tend logiquement, dans une société individualiste, à se concentrer toujours davantage en quelques mains : pour cela, le grand capital doit manger le petit, et cette concurrence se fait au détriment du travail, qui doit tout payer.

Les sociétés de résistance, au lieu d'être les instigatrices des grèves, en sont donc simplement la conséquence logique.

Toutes les déclamations ont été faites par les doctrinaires, économistes bourgeois et autres, contre la grève, cette plaie sociale qui démoralise l'ouvrier, aigrit les relations entre patrons et employés et en fait des ennemis alors qu'ils devraient être comme père et fils,etc. Nous n'avons pas à réfuter ici ces tirades sentimentales de gens intéressés à conserver l'ordre social actuel ; ce que nous devons faire, nous ouvriers, c'est de rechercher si le droit de grève doit exister pour nous, si la grève est une conséquence de l'état de guerre économique dans lequel nous vivons, et, enfin, si elle peut apporter quelques soulagements à notre position.

Personne n'a jamais contesté à un patron le droit de donner congé à un ouvrier ne remplissant pas les conditions qu'il en attendait. chacun admet qu'un patron a le droit de chercher à réaliser le plus de bénéfices possibles, et qu'il peut refuser du travail à un ouvrier qu'il sait ne pas pouvoir lui en procurer assez ; en un mot, on accorde parfaitement au patron le droit de grève vis-à-vis de l'ouvrier ; mais comme nous vivons dans une société où la logique et la justice sont deux choses peu observées, ce droit qu'on accorde aux patrons, on le refuse aux ouvriers ; un ouvrier refusant d'accepter du travail à des conditions qui ne lui conviennent pas est un mauvais sujet ; s'il se met en grève, c'est un anarchiste ; si un certain nombre d'ouvriers se coalisent et cessent de travailler, le législateur a prévu le cas et, tout soucieux des intérêts bourgeois, interdit aux ouvriers le droit de coalition. Nous qui aimons les positions franches, et acceptons l'état actuel parce que nous y sommes contraints, nous disons : un patron doit avoir le droit de refuser du travail à un ouvrier qui ne lui convient pas, mais un ouvrier doit également avoir le droit de refuser des conditions de travail que son intérêt lui commande de ne pas accepter ; d'où il résulte que des ouvriers se coalisant pour résister, par la grève, à des prétentions injustes ou pour réclamer les améliorations qu'ils jugent nécessaires, agissent d'après un droit incontestable.

La grève est-elle une conséquence de l'état économique dans lequel nous vivons ? - De l'antagonisme existant entre le capital et le travail, il résulte que tous deux cherchent, chacun de son côté, à avoir la plus grande part dans les résultats de la production obtenue par leur concours commun, d'où une guerre continuelle entre ces deux facteurs de la richesse sociale. La grève, éclatant, soit de la part des travailleurs, soit de la part des capitalistes, n'est que le résultat des relations entre le capital et le travail ; que ces deux éléments soient unis, par le renoncement du travail d'hier, c'est-à-dire du capital, à prélever une part quelconque sur le travail d'aujourd'hui, et la grève disparaît de la société, comme la guerre politique disparaîtra de la fédération des peuples débarrassés de tous les tyrans et exploiteurs. Jusque-là, nous devons accepter la grève comme la dernière protestation du travailleur salarié contre le patronat et le capital.

La grève peut-elle apporter quelques soulagements à notre position ? Toutes les améliorations obtenues par la grève n'ont jamais eu d'effets durables, disent les économistes politiques, parce que les patrons sauront toujours profiter d'un moment favorable pour reprendre aux ouvriers ce qu'ils avaient dû leur concéder précédemment ; et, en outre, lorsque les salaires s'élèveraient dans toutes les industries, les ouvriers devraient rembourser, sur le prix des objets de consommation, ce qu'ils auraient obtenu par l'élévation des salaires. - Mais, en se mettant en grève, un corps de métier ne calcule pas, et, avec l'organisation aujourd'hui très incomplète de la classe ouvrière, ne peut pas calculer toutes es probabilités qui résulteront de la grève ; il agit d'après les nécessités du moment, parce que les patrons n'ont pas voulu faire droit aux réclamations collectives des ouvriers. Que la grève réussisse, il y a évidemment augmentation immédiate de bien-être pour l'ouvrier, et c'est là son but ; si elle échoue, il y a perte considérable pour toutes les parties intéressées. Mais dans les deux cas, une grève aboutit généralement à une organisation plus solide des ouvriers; ce qui permet dès lors de contrebalancer mieux l'influence et les exigences du patronat ; quant à prétendre qu'une augmentation des salaires, dans un métier, n'améliorerait en rien la position des ouvriers, parce que les salaires s'élèveraient bientôt dans toutes les autres industries, les économistes oublient que le travail n'est pas le seul élément qui fait aujourd'hui la valeur d'un produit, mais que le capital, représenté par la féodalité industrielle et mercantile, a souvent des exigences dépassant de beaucoup celles du travail ; pour que les ouvriers puissent élever les salaires dans toutes ces professions d'une manière à peu près égale, il faudrait que tous les corps de métier fussent puissamment organisés, et alors, au lieu de continuer une lutte éternelle avec le capital, ils pourraient en supprimer radicalement tous les privilèges.

Nous reconnaissons parfaitement que la grève n'est pas un moyen bien efficace d'améliorer la position du prolétariat, mais c'est le seul moyen qu'il possède de se faire rendre justice, lorsque le patronat a des exigences compromettantes pour l'existence des ouvriers. On peut d'ailleurs parer aux effets funestes des grèves par une organisation ouvrière qui rende ces effets impossibles ; c'est ce dont nous allons nous occuper.



Nous avons vu que les associations ouvrières sont nées de la nécessité où était le travail de se défendre contre les empiétements du capital ; il faut rechercher quel est le meilleur mode d'organisation. La société de résistance, ayant pour but la sauvegarde des intérêts ouvriers, s'organise entre les individus d'un même métier habitant la même localité ou un groupe de localités rapprochées ; comme tous les ouvriers de la même corporation ont des intérêts identiques, quels que soient la localité ou le pays qu'ils habitent, et que, pour défendre leurs intérêts professionnels communs, ils doivent continuellement se renseigner mutuellement, les sociétés d'un même métier se fédèrent entre elles, par région, puis internationalement. D'un autre côté, tous les ouvriers habitant la même localité, quelle que soit la profession qu'ils exercent, ont aussi des intérêts communs à sauvegarder : constituer la fédération locale des associations ouvrières, tel est le moyen de répondre à ce besoin d'union locale et de donner une nouvelle force aux efforts des différents corps de métier. Ce qui est une nécessité pour la localité, l'est aussi pour le pays, pour le monde civilisé ; pour sauvegarder les intérêts généraux du prolétariat, il faut la fédération d'abord régionale, puis internationale, des sociétés de résistance ; dès lors, nous pouvons opposer l'organisation universelle du travail au capital centralisé entre les mains d'une aristocratie financière qui, elle aussi, opère internationalement.

Cette organisation des caisses de résistance, qui est loin d'être un fait actuellement, mais vers laquelle tendent les efforts de tous les ouvriers sérieux, n'est pas seulement une nécessité par le fait de la misère des populations ouvrières, mais elle est aussi la conséquence logique du développement économique de notre époque, et la seule condition possible du succès général. Une corporation isolée pouvait parfaitement lutter contre quelques petits patrons, n'ayant que leurs faibles ressources financières ; mais, ensuite de l'introduction des machines, de la division du travail, de la centralisation des capitaux, la grande industrie se substitue peu à peu à la petite, les patrons deviennent de grands capitalistes-entrepreneurs, constituent des sociétés financières qui accaparent tout : industrie, mines, commerce, banques, circulation, et même les gouvernements. Dès lors la société de résistance isolée n'a plus aucune force d'action devant la nouvelle puissance ; mais à un fait on peut opposer un autre fait : les sociétés de résistance d'une même localité, en se fédérant, créent une puissance capable de lutter contre les exigences des patrons. Ceux-ci alors font appel à leurs compatriotes, pratiquent la solidarité nationale, et, la corruption aidant, on transporte, en cas de grève, les ouvriers d'une localité à l'autre pour remplacer les gréveurs : l'union nationale ou régionale des caisses de résistance devient alors d'une absolue nécessité. Le combat se poursuit plus loin : le capital abdique la patrie, opère sur le terrain international, s'empare du marché général, et, grâce aux moyens financiers et de circulation dont le capital dispose, les efforts des fédérations nationales se trouvent de nouveau paralysés. Internationaliser le travail, solidariser tous les intérêts ouvriers, former la fédération universelle des travailleurs, tel est le moyen de lutter avec efficacité contre le capital monopolisé.



L'Association internationale des travailleurs, en répondant à ce nouveau besoin, n'a pas été créée en vue de l'agitation socialiste, comme on le prétend généralement, mais elle n'est que le résultat du développement économique de ce siècle ; si elle doit rechercher, dans l'expérience du passé et les événements de chaque jour, les moyens de défendre, dans les conditions actuelles, les droits du travailleur, elle doit aussi rechercher, dans le socialisme scientifique, les moyen de mettre fin à toute exploitation de l'homme par l'homme et d'établir le règne de la justice sociale. Nous ne voulons pas défendre ici l'Internationale contre toutes les attaques dirigées contre elle ; nous croyons avoir suffisamment démontré que ce n'est que par l'union internationale des travailleurs que ceux-ci pourront contrebalancer les effets de l'union internationale des capitalistes ; nous ne pouvons que conseiller à toutes les associations ouvrières d'y adhérer le plus tôt possible, et de ne pas attendre que la nécessité les y contraigne.

Il existe, à l'égard de l'Internationale, un préjugé très répandu et qui peut nuire considérablement à la cause ouvrière : suivant l'idée que s'en font encore beaucoup d'ouvriers, l'Internationale serait une Providence bienfaisante pour les ouvriers, elle n'aurait qu'à puiser dans ses caisses et répandre à profusion les ressources nécessaires pour alimenter les grèves, etc. Non ! L'Internationale n'est pas une puissance abstraite, elle n'a pas de coffres-forts garnis, mais elle est la résultante des forces et des ressources combinées des associations ouvrières fédérées internationalement. Plus les ouvriers y adhéreront en masse, et plus elle acquerra de puissance, plus l'organisation, la combinaison des forces économiques et sociales qu'elle contient sera facilitée pour le bien de tous.


Il nous reste à examiner quels résultats nous pouvons obtenir, au moyen de l'organisation fédérative des associations ouvrières.

Les ouvriers, une fois organisés de la sorte, peuvent réclamer toutes les améliorations qu'ils jugeront nécessaires, le patronat devant rendre justice en présence de l'universalité des travailleurs, puisque, en refusant collectivement leur travail, ceux-ci enlèvent au capital sa valeur et sa puissance, à moins qu'il ne représente des objets immédiatement consommables.

Les ouvriers seraient d'autant plus certains de faire triompher toujours dans leurs revendications que, au moyen d'une organisation fédérative, ils pourraient être constamment au courant de tout ce qui rattache à leur industrie particulière, avoir tous les renseignements possibles sur l'offre et la demande, sur le taux des salaires et le chiffre des heures de travail, sur le nombre d'ouvriers et d'apprentis employés dans les différentes localités, sur les ressources dont peuvent les sociétés fédérées ; et, alors qu'un corps de métier croirait réclamer une amélioration quelconque, avec tous ces renseignements il pourrait toujours choisir le moment où il serait sûr de réussir ; ajoutons que ce serait aussi le meilleur moyen de supprimer les grèves, sans pour cela sacrifier les droits et les intérêts des ouvriers.


Les améliorations à obtenir actuellement pourraient être les suivantes :
 
  1. Opposition à la baisse des salaires et tendance à leur élévation graduelle. Arrivés à un certain degré, les corps de métier s'en tiendront là, parce que toute tendance à élever outre mesure les salaires compromettrait les résultats acquis ; les professions les moins favorisées, aidées par les autres; pourront alors travailler à élever leurs prix jusqu'au niveau des métiers privilégiés ;
  2. La réduction des heures de travail est aussi l'un des points principaux dont peuvent s'occuper avec succès les sociétés de résistance fédérées : tant que l'ouvrier devra toutes ses forces tout son temps, toutes ses facultés au travail manuel, il ne sera qu'une machine humaine ; il faut absolument, pour que l'ouvrier puisse remplir ses devoirs sociaux, qu'il ait le temps nécessaire à consacrer au développement de ses facultés intellectuelles ;
  3. La question de la fixation du nombre des apprentis peut être résolue scientifiquement par les sociétés fédérées, et cela non pas au moyen de décrets tyranniques, empêchant aux jeunes gens l'apprentissage d'un métier et violant la liberté du travail, mais au moyen de statistiques générales sur la position et les besoins des différentes industries ;
  4. L'introduction des machines, qui a lieu, jusqu'à ce jour, sans aucun égard pour la position des ouvriers, peut aussi être réglée, au moyen des caisses de résistance, de manière à sauvegarder les intérêts de tous. Il en est de même pour ce qui concerne l'hygiène dans les ateliers et les manufactures ;
  5. Le travail des femmes, qui, aujourd'hui, fait une concurrence désastreuse à celui de l'homme, peut être relevé, au moyen de l'association ; nous ne pouvons, sans une injustice criante, sans une immoralité profonde, interdire à la femme le droit au travail, mais nous devons, sous peine de rendre inutiles nos efforts, travailler à ce que l'exercice de ce doit ne soit plus un danger pour nous, mais au contraire un gage certain de moralisation générale.
  6. Les associations coopératives de production peuvent s'organiser dans le sein des sociétés de résistance, sans qu'elles tendent à reconstituer un patronat collectif ; elles peuvent même, ainsi organisées, devenir un moyen d'augmenter la force d'action des entreprises plus générales, qui exercent une influence sur l'ensemble du prolétariat. Telles sont les questions actuellement pratiques dont pourrons s'occuper avec succès les associations ouvrières fédérées.
Citoyens,
Notre  tâche est terminée : nous croyons avoir suffisamment démontré la nécessité d'une organisation ouvrière, les moyens pratiques pour que cette organisation serve réellement nos intérêts communs et particuliers ; il nous reste à vous engager à mettre sérieusement la main à l'Ïuvre. La question sociale, aujourd'hui, domine toutes les autres, parce que c'est la question du pain : le monde bourgeois et privilégié ne peut la résoudre, par la raison qu'il croit à la parfaite légitimité de l'état de choses actuel ; la classe ouvrière seule peut, par une étude complète de l'économie sociale, par une action suivie et générale, aboutir  à une solution rationnelle. Ouvriers, ne comptons donc que sur nous-mêmes et organisons-nous en vue de l'étude et de l'action communes.

Ouvriers horlogers ! Nous oublions les expériences du passé, nous ne nous préparons pas à subir de nouvelles crises ; les caprices d'une diplomatie intrigante, la découverte d'une machine et son introduction dans notre industrie, peuvent de nouveau produire une crise profonde, nous laissant sans travail ; comment alors résister aux conséquences de pareilles misères ? Songez-y bien, l'avenir n'est pas certain, tant que nous négligeons de sauvegarder notre existence au moyen d'une organisation générale. On ne fait rien de réellement pratique sans sacrifices pécuniaires : il faut donc profiter des époques où le travail ne manque pas, pour constituer les capitaux nécessaires à garantir l'existence de tous ; cette épargne que nous devons faire, dans l'intérêt commun, n'est pas un détournement des ressources de la famille, mais, au contraire, la seule condition possible qui permettra de vivre, en temps de crise, sans subir les angoisses de la misère. Pour que la pratique de la solidarité devienne une réalité, il faut des ressources financières que nous ne devons attendre que de nous-mêmes : que chacun apporte son obole à la caisse commune, et les droits de chaque travailleur seront toujours respectés.

Solidarité ! Oui, c'est en la pratiquant sur une grande échelle, dans toutes les circonstances de la vie ouvrière, que nous parviendrons à opposer, à l'ambition bourgeoise et capitaliste, une puissance capable de défendre avec succès les droits et la vie du travailleur. Malheureusement l'esprit de solidarité n'anime pas encore assez la classe ouvrière, et, si tous ne se réveillent promptement à cette vie nouvelle, le triomphe complet de la cause du travail sera d'autant plus retardé. Pour que la pratique de la solidarité porte tous ses fruits, il faut la régulariser, il faut une organisation ouvrière qui nous garantisse un appui énergique dans des cas bien déterminés, et aboutissant toujours au résultat voulu. Si les échecs que nous signale l'histoire contemporaine du mouvement social sont, en partie, dus au défaut d'une solidarité suffisante, on peut certainement en mettre une bonne part sur le compte du manque d'une organisation sérieuse. Que nous réclamions toutes les améliorations que nécessite notre position : c'est notre droit ! Que nous nous organisions puissamment de manière à toujours triompher dans nos revendications : c'est notre devoir ! Les sacrifices de toutes sortes que nous sommes appelés à nous imposer doivent absolument aboutir à des résultats pratiques, autrement ils ne sont qu'une aggravation de notre position ; et le moment est venu, après une époque de tâtonnement, de se mettre partout sérieusement à l'Ïuvre pour constituer la fédération universelle du travail associé contre le capital monopolisé. Que, dans toutes les professions, il se fonde une caisse de résistance ; que toutes les sociétés se fédèrent entre elles, par localité ou groupe de localités, par région, et enfin internationalement ; que chaque métier constitue, au sein de la grande famille, une fédération particulière, et nous aurons une organisation puissante et satisfaisant complètement les intérêts des ouvriers.

Le travail est commencé, il faut le compléter : plusieurs professions sont déjà organisées, que les autres les imitent, viennent compléter et fortifier la fédération ouvrière du Vallon de Saint-Imier, et nous pourrons attendre, avec plus de confiance, les événements que pourrait nous réserver l'avenir.

La Commission ouvrière se met à la disposition de toutes les personnes désireuses de prendre l'initiative de la fondation de sociétés de métiers, pour tous les renseignements relatifs à l'organisation des sociétés ouvrières.


La Commission ouvrière nommée à l'assemblée du 31 octobre 1869 :
 
Adhémar SCHWITZGUÉBEL

Source :
© Canevas Éditeur, Saint-Imier, 1990