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Mumia Abu-Jamal
Des origines de la haine
Contrairement à une opinion très complaisamment répandue, le bombardement - à l'aide d'avions de ligne et de leurs passagers - des tours du World Trade Center et du Pentagone n'a pas débuté le 11 septembre 2001. Pas plus que cet acte ne relève d'une hypothétique "Guerre contre la civilisation", comme l'ont déclaré spécieusement de nombreux hommes politiques.

S'il est vrai que le rôle des politiques n'est pas d'informer, et que cette fonction incombe normalement aux médias, la préoccupation essentielle de ceux-ci étant de vous vendre leurs produits, ils ne souhaitent pas vous déplaire. La responsabilité qu'ils assument en priorité ne concerne donc pas leurs lecteurs, mais bien plutôt leurs propriétaires et/ou leurs actionnaires. Et l'absence d'information, voire la désinformation, qui en résultent, servent au bout du compte conjointement les intérêts industriels et militaires.

Les attaques aériennes suicidaires de New York, Washington et en Pennsylvanie ont véritablement commencé dans les montagnes d'Afghanistan, pendant une guérilla de 10 ans alors conduite contre l'ex-Union Soviétique. Cette guerre a été fomentée et soutenue par la CIA, qui y a investi des sommes colossales pour entretenir ce foyer insurrectionnel anti-soviétique.

Résultat ? Dans l'édition du 4 août 1996 du Los Angeles Times, un sociologue algérien a déclaré à un journaliste américain, rencontré à Alger : "Votre gouvernement a participé à la naissance d'un monstre, qui s'est maintenant retourné contre vous et le reste du monde -- les 16.000 Arabes entraînés au combat en Afghanistan se sont transformés en une véritable machine à tuer." En page 2 de la même édition du Los Angeles Times, un diplomate américain en poste au Pakistan partage cette opinion et déclare : "C'est un exemple démentiel du retour d'une basse-cour au poulailler. Impossible d'injecter des milliards de dollars dans une guerre-sainte anti-communiste, d'y accueillir des participants en provenance de nombreux autres pays du monde, tout prétendant ignorer les conséquences. C'est pourtant ce que nous avons fait. Nos objectifs n'étaient pas d'établir paix et stabilité en Afghanistan. Notre objectif était d'exterminer les communistes locaux et de chasser les occupants soviétiques."

Comment l'Afghanistan, pays aussi pauvre et ravagé par les conflits, a-t-il pu financer son armement ? Rares sont les citoyens occidentaux au courant du fait que les mujaheddins Afghans sont devenus le plus important producteur mondial d'héroïne ? A court d'argent liquide, les mujaheddins Afghans ont donc pu troquer leur héroïne -contre les armes dont ils avaient besoin pour se battre- avec les fournisseurs de la CIA, donnant ainsi naissance à une filière de trafic de stupéfiants aujourd'hui connue sous le nom de "Croissant d'Or".

Les Soviétiques chassés, à la fin de cette longue guerre, les insurgés ont regardé autour d'eux, pour constater avec colère que la domination américaine de la région avait tout simplement remplacé la domination soviétique. Ils ont constaté la persistance de l'occupation américaine des villes-saintes islamiques en Arabie Saoudite, le soutien américain apporté aux états-vassaux arabes non-démocratiques, les ravages infligés à l'Irak,  le soutien américain inconditionnel apporté à l'état d'Israël au mépris des Palestiniens spoliés, et leur regard -devenu critique- sur les USA y a découvert le même brutal impérialisme que chez l'ancien occupant soviétique, si longuement et farouchement combattu.

En Afghanistan, l'un des endroits les plus pauvres et rudes de la planète, la population male dispose d'une espérance de vie de 46 ans (45 ans pour les femmes) et 71% de la population est confiné dans l'analphabétisme. Comment l'insolente opulence des Américains, les plus riches de l'empire global américain, pourrait-elle ne pas les indigner ? D'aussi profondes fractures nationaliste, culturelle, religieuse et de classe, alimentent un ressentiment profond et durable contre la domination américaine.
L'humiliation profonde dont le monde islamique a immensément souffert depuis la chute de l'empire Ottoman en 1922, et pendant l'ère coloniale du début au milieu du vingtième siècle, s'est transformée en une haine puissante. Aussi forte que celle qui a poussé -après la première guerre mondiale- un simple citoyen Allemand à la conquête du monde entier.

Une aussi grave situation ne doit pas être prise à la légère. La situation en Afghanistan risque de représenter un nouveau tournant dans l'histoire du monde. N'est-ce pas là une raison suffisante pour tenter de la mieux comprendre ?
 


Copyright 2001 Mumia Abu-Jamal. All rights reserved.
 

The airplane bombing of the WORLD TRADE center towers and of the Pentagon didn't begin on Sept. 11, 2001. Nor are they, as some politicians glibly suggest, "A war against civililization."

But it ain't the job of politicans to inform you. It is the job of the media, but their central concern is to sell you, and therefore they don't want to upset you. Their primary responsibility is not to their readers, but to the owners, or the stockholders. And it is the interests of the military-industrial-complex that millions remain uninformed and misinformed.

The suicide flights over New York, Washington and Pennsylvania had their beginning in the mountainous terrain of Afghanistan, in the 10-year guerilla war against the former Soviet Union. That war was supported and facilitated by the U.S. CIA, which pumped billions into the anti-Soviet insurgency.

The result? An Algerian sociologist told an American journalist in Algiers, "Your government participated in creating a monster." The sociologist added, "Now it has turned against you and the world -- 16,000 Arabs were trained in Afghanistan, made into a veritable killing machine." (Los Angeles Times, Aug. 4, 1996). A U.S. diplomat in Pakistan echoed these sentiments when he said, "This is an insane instance of the chickens coming home to roost. You can't plug billions of dollars into an anti-Communist jihad, accept participation from all over the world and ignore the consequences. But we did. Our objectives weren't peace and grooviness in Afgha-nistan. Our objective was killing Communists and getting the Russians out" (Los Angeles Times, Aug. 4, 1996, p. 2).

How did the Afghanis pay for the weapons, in such a poor, war-ravaged country? How many know that Afghanistan is the world's greatest producer of heroin? Short on hard dough, the Afghan mujaheddin traded heroin for arms with their CIA suppliers, and the "Golden Crescent" heroin ring was born.

When the Soviets were whipped, and the war ended, the insurgents looked around and saw, not Soviet, but U.S. dominance in the region. They saw the U.S. military presence in the Islamic holy places in Saudi Arabia, its backing of anti-democratic client states, its ravaging of Iraq, and its one-sided support of Israel at the expense of the beleaguered Palestinians, and as they examine the U.S., they see the imperial similarities to the Soviets.

Afghanistan, one of the poorest, most rugged places on earth, has a population with a male life expectancy of 46 (45 for females!). It has a literacy rate of about 29%. It looks at the swollen opulence of the Americans, the global reach of the American empire, and bristles. This nationalist, cultural, religious and class distance fuels a deep and abiding hatred of Americandominance. Humiliation, of which the Islamic world has had a great deal since the fall of the Ottoman Empire in 1922, and the colonial era of the early-to-middle Twentieth Century, is a powerful force. It brought a humbled German to the brink of world conquest after World War I.

It is not to be taken lightly. Afghanistan may prove another turning point in world history, which is why we all should learn about it.



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