Théo Simon — Le mouvement antimondialisation, une marche pour la recomposition de la gauche

Théo Simon (Gp FA Nantes)
Le mouvement antimondialisation,
une marche pour la recomposition de la gauche
?

 
Le Forum Social Européen de Florence a été un préambule de ce que l'on va vivre lors des prochaines mobilisations contre le sommet du G8 d'Evian ou lors du Forum Social Européen de St Denis (Automne 2003). Effectivement on s'est bousculé pour s'y montrer jusqu'à des membres «imminents» du Parti Socialiste comme Hollande, Emmanuelli, Dray...

La gauche tente de se refaire une légitimité

Le 20 Novembre Bernard Cassen (toujours à ce jour président d'Attac) rencontrait Hollande au siège du PS. Le 26 Novembre, Harlem Désir (ex militant de la dite société civile) député PS au parlement européen le 26 Novembre dernier rencontrait Suzan George, vice-présidente d'Attac, pour discuter de la taxe Tobin. Le 28 Novembre, il rencontrait Christophe Aguiton (membre d'AC, du DAL, d'Attac, et aussi de la 4eme Internationale trotskiste). Artisan du courant «Le Nouveau Monde», gauche du PS (tout un programme !) Emmanuelli le 2 Décembre rencontrait officiellement un groupe d'Attac des Landes, le 12 Décembre Dray et Montebourg rencontre Bruno Rebelle, directeur de Greenpeace !

C'est une opération de charme tout azimut, de réunions post-électorales, à des rencontres informelles sur l'annulation de la dette.

A Florence, Hollande serrait la main de Bernard Cassen et José Bové. Un José Bové défendu unanimement (avec une demande de recours en grâce) par le PS quelques jours après alors que ce dernier était poursuivi en justice sous la législature du PS. On radicalise les discours. «La mondialisation est aujourd'hui présentée comme un fait. Certes, elle est aujourd'hui un fait. Mais elle est surtout le résultat d'une succession de choix politiques qui n'ont pas été délibérés en connaissance de cause ou qui l'ont été dans le dos des citoyens ! Et nous voici pris en otages dans le chantage du capitalisme des actionnaires les plus voraces disposant de la liberté de placer leur capital dans le lieu de la rémunération du travail le plus favorable à la satisfaction des actionnaires... » (Projet Nouveau Parti Socialiste,26/10/02)

On croit rêver ! S'il y a unanimité au PS, c'est bien l'enjeu de récupération, de captation de la mouvance anti-mondialisation. «Il faut créer une coalition arc-en-ciel, un lieu institutionnel de rencontres entre nous, syndicats et associations, comme en Italie et en Espagne, pour mener des campagnes communes». Au forum de Florence on dénonce l'idéologie néo-libérale, concept creux car il n'existe pas d'idéologie néo-libérale ! L'idéologie est celle du capitalisme que l'on dénonce depuis tant de décennies et ce que l'on peut appeler de «néo-libéralisme»  tout comme la mondialisation n'est qu'un processus historique donné. Fort heureusement la sauce aura du mal à prendre, pour preuve l'éjection des trois anciens ministres PS (Vaillant, Guigou, Royal) qui ont tenté de rejoindre le cortège syndical pour la défense du service public le 26 novembre dernier.

Le Parti Communiste Français n'est pas non plus en reste. Patrick Braouezec, député maire de St Denis, explique dans L'humanitétrès clairement cette politique de rapprochement qui ne fait que cacher implicitement une volonté de récupération et d'instrumentalisation. Suite au forum de Florence, il déclare «Des débats entre les mouvements sociaux et les forces politiques ont été inscrits au programme ! Rien de durable ni de solide ne pourra se faire sans cette relation constante entre les partis de gauche engagés dans une volonté de changements radicaux et cette forme de démocratie participative que sont les forums sociaux. Chacune des parties prenantes doit le faire en toute autonomie, dans un respect mutuel, mais avec ce même objectif partagé d'arriver à formuler et à appliquer des alternatives au libéralisme économique et aux tournures belliqueuses qu'il prend quand il entre en crise. » Déclaration à prendre au sérieux quand on sait que le prochain forum social européen se tiendra à l'automne 2003 dans la ville qu'il dirige ! Quant aux Verts, après 5 années de gouvernement, ils/elles vont dans le même sens. Sans rupture profonde avec le PS et son modèle social-démocrate, la motion majoritaire affirme que «c'est dans les luttes de terrain qu'est née l'écologie politique, qu'elle approfondit ses exigences, peaufine ses solutions... Il faut pour cela multiplier nos rapports avec les forces politiques, partis, associations et mouvements qui, à un titre ou un autre, cherchent une alternative au productivisme, au libéralisme, à l'autoritarisme, au racisme, au machisme et à l'homophobie...»

La construction d'un pole radical à gauche ?

Emmanuelli le 21/11/02 avait, il est vrai, une analyse correcte sur la situation de la gauche et ses rapports de forces internes. «Nous sommes convaincus que la gauche doit d'abord recréer les conditions de son propre rassemblement hors de la ligne social-libérale. Ni les communistes, ni les Verts, ni la gauche mouvementiste pas plus qu'une large fraction de l'électorat socialiste ne n'accepterait. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons une clarification de cette ligne, préalable à toute tentative de rassemblement de la gauche, parce que notre parti, avec ses qualités et défauts, reste le pivot indispensable de ce futur rassemblement... Si par malheur nous n'y parvenions pas, le risque est grand de voir se constituer sur la gauche de notre parti un pole de radicalité, vieux rêves des gauchistes, qui couperait la gauche en deux... » Et il est évident que cette analyse est portée collectivement par la Ligue Communiste Révolutionnaire qui du haut de ses 4.32% au présidentielle tente de se placer au centre de cette nouvelle alternative. Lors du meeting contre la guerre en Irak à Paris le 19 Novembre, Christian Picquet affirme que «le processus de reconstruction d'une nouvelle force de gauche est urgent». La LCR joue à plusieurs niveaux : dans un premier temps au niveau  des partis institutionnels en écrivant à l'ensemble des partis de gauche dont les Verts, le PCF et le PS espérant ainsi récupérer les franges les plus radicales. Dans un deuxième temps la LCR tente de se placer au centre du mouvement social, d'en être l'expression politique. Car derrière les déclarations de principes d'indépendance des mouvements sociaux, ils sont de faits des enjeux politiques dans la recomposition de la gauche. «C'est là que nous ferons bouger le rapport de force entre la gauche et nous» analyse Olivier Besancenot. Et effectivement la LCR s'y attache avec une politique d'entrisme de contrôle de plusieurs organisations (conseil d'administration d'Attac, AC, les Suds...), par une présence de plus en plus remarquée lors des différents sommets et rencontres internationales (lors du dernier sommet de Florence, près de 15000 numéros de Rougeen trois langues ont été distribué ).

Un affrontement dont nous n'avons rien à gagner

La LCR porte en son sein les contradictions du trotskisme. Une tendance réformiste qui s'était fortement exprimée lors de son dernier congrès autour du changement de nom. Les noms souhaités, espérés étant «Mouvement des radicaux de gauche», «gauche démocratique et révolutionnaire»... Cette tendance s'exprime aussi dans les organisations de l'ex gauche plurielle avec les refondateurs du PCF ou le courant de la gauche socialiste du PS, dont nombre de cadres sont issus de la LCR. Un des derniers transfuge est celui de Gérad Filoche qui après avoir été 30 ans à la LCR a rejoint ce courant et a pris des galons très rapidement en étant le porte-parole de ce courant dans le débat sur les 35 heures. Un autre courant fait son pari sur la «société civile» et sur les mouvements sociaux. L'outil classique est celui de l'entrisme dans un objectif de «radicaliser les minorités combatives» ou d'adopter la tactique du «front unique» visant à mettre les réformistes au pied du mur, face à ces contradictions.

Mais dans tous les cas, quelle que soit la phraséologie adoptée, dans les différentes stratégies de la LCR ou de la gauche plurielle le point commun est le changement de champ : du champ social et de l'affrontement social à la scène politique et de la conquête du pouvoir politique. Hollande en s'adressant à la presse s'exprimait très bien sur ce sujet à Florence «Le rôle des mouvements sociaux, des syndicats et des formations politiques est de porter un certain nombre de revendications qui naissent ici et de leur donner une traduction concrète au niveau gouvernemental.»

Notre stratégie doit être claire et différente. Conscient-es et favorables à l'émergence d'un mouvement social, notre volonté est certes de vouloir politiser, globaliser et fédérer les luttes. Mais ce qui nous distingue de l'ensemble de la gauche, c'est notre position au sein de ce mouvement. Minorité agissante, nous débattons, proposons, confrontons nos analyse afin de favoriser une vision globale anticapitaliste, afin de favoriser l'auto-organisation, afin que se produise des ruptures. Mais nous restons une minorité agissante avec, sans perspective d'instrumentalisation, de manœuvres. Nul doute qu'un des enjeux pour nous, lors des mobilisations autour du sommet du G8 ou du prochain forum social européen, est bien de mettre en évidence l'impasse stratégique des différentes gauches et d'affirmer la nécessité d'indépendance du mouvement social.



Théo Simon (Gp FA Nantes)
Pièce au dossier :

Voici un tract que nous avons sorti en 200 ex A5 (c'est pas notre priorité), suite à une altercation qui nous a opposé à la LCR-JCR 35. Ces derniers on fait barrage pour protéger le PS qu'on voulaient (avec la FA et d'autres) sortir de la tête de manif.

C'est pas la premiére fois que çà arrive, et donc notre syndicat a décidé de sortir un tract pour réexpliquer les vrais responsabilité du PS, et pour éviter que les têtes des militants et sympathisants LCR-JCR soient pollué de l'argumentation politicienne des pontes de la ligue.

Le collectif antiguerre auxquels ils participent avec le PS, nous a envoyé un courrier semi anonyme où ils dénoncent notre attitude irrespectueuse des personnes et des biens publics que l'on dégrade avec des bombages! Oh lala!
 


Lettre ouverte à la LCR/JCR
et à celles et ceux qui pensent encore que l'habit fait le moine

Le Samedi 22 Mars 2003, l'UL CNT et la FA voyant les politiciens du PARTI SOCIALISTE s'installer en tête de la manifestation contre la guerre en IRAK, avaient pris l'option (par souci de salubrité publique) de les reléguer en fin de cortége.

En effet, comment laisser une place parmi nous à ce soit disant parti social ? (rafraichissons nous la mémoire !):

- qui en 1991 avec le gouvernement JOSPIN, s'était aligné sur les positions des ETATS UNIS pour aller défendre les réserves pétroliéres des EMIRATS ARABE UNIS.- qui a soutenu l'embargo contre le peuple IRAKIEN et à contribuer à la mort de dizaine de milliers d'enfants.- qui a maintenu et entretenu la soumission à la france de certains dictateurs africains, qui a perpétué avec les réseaux PAPAMADI (cf le fils MITTERAND) le système françafrique, pillant via les entreprises françaises type TOTALFINA ELF les richesses naturelles, contribuant ainsi à maintenir dans la misère des millions d'africains.
- qui a favorisé (avec MITTERAND pére) l'ascension de LE PEN et des facistes du FRONT NATIONAL à des fins électoralistes.
- qui, impuissant face au chômage, a développé la paranoïa sécuritaire (cf la LSQ -lois sur la sécurité quotidienne et la prolifération de la vidéo surveillance) en criminalisant la partie la plus pauvre de la population .- qui dans la lignée PASQUA a organisé avec le zombie CHEVENEMENT l'expulsion des sans papiers par charter ?
- qui a refusé le droit de vote aux immigrés ?
- qui s'est lamentablement écrasé e face aux licenciements massifs (cf. RENAULT VILVORDE, DANONE ou MICHELIN),et qui a accordé des exonérations fiscales au patronat ?
- qui (autant que la droite) a poursuivi la casse et la privatisation du service public ?
- qui a commencé la liquidation du système de retraite par répartition avec les lois FABIUS qui favorisent le développement des retraites par capitalisation ? etc.etc.etc...

Comment laisser sa place à ce parti politique qui a profité de la confiance de ses électeurs (souvenez vous de 1981) pour les poignarder dans le dos en s'inclinant face aux lois de l'économie capitaliste et créer ainsi une dépolitisation généralisée ?

Comment accepter que défile en tête le PARTI SOCIALISTE, anciens gouvernants qui hier encore, envoyaient les CRS calmer les victimes de leur politique de soumission au patronat?

Comment accepter cela, sans être soit même un vulgaire politicien carriériste se réclamant de gauche ou d'extrème gauche pour faire sociale ?

La LCR et les JCR en tout cas ne semblent pas s'embarrasser de ces questions et marchent main dans la main avec le PS dans le collectif rennais antiguerre. Mieux même, ils protégent le PS (commme CHEVENEMENT à PARIS) quand certains veulent les empécher de recupérer la manifestation.

Dés lors, comment croire encore au discours "autogestionnaire" et à la dénomination "révolutionnaire" quand on dévellope une stratégie électoraliste ayant pour ambition inavouée de remplacer le feu PC au sein de la future gauche plurielle?

CNT etpreci35